[Technique] Rénovations, réparations, optimisations et bidouilles autour du vélo

Un peu d'histoire...

La paternité de la bicyclette est attribuée au baron Drais, qui fit breveter son invention en 1815. Mais ce que l'Histoire omet souvent de préciser, du moins si l'on se limite au point de vue francophone, c'est le contexte historique de cette invention. En effet, en 1815, comme le reste du monde, l'Europe commence à subir de plein fouet les conséquences de l'éruption volcanique du stratovolcan Tambora. Cette éruption reste la plus forte jamais enregistrée dans l'histoire de l'humanité, sa puissance dépassant de plus de 10.000 fois la puissance combinée des 2 explosions nucléaires d'Hiroshima et Nagasaki. L'éruption va durer des mois. Si les victimes directes se comptent par dizaines de milliers, le nombre de victimes indirectes de par le monde est autrement plus élevé : de plusieurs centaines de milliers à quelques millions... La défaite de Napoléon à Waterloo - marquée par des conditions climatiques excécrables - serait également imputable à cette éruption. Surtout, cette éruption est à l'origine, en 1816, de la fameuse "année sans été", une année marquée par un hiver volcanique ayant entraîné partout sur la planète de mauvaises récoltes et des famines.



Le centre de l'Europe a été particulièrement touché par la disette. Des pays comme La Suisse, l'Allemagne, l'Autriche, la Hongrie, la Pologne... ont déploré des dizaines de milliers de victimes, la faim poussant même une partie de la population a émigrer vers des cieux plus cléments comme les Amériques ou l'Afrique du Sud. Dans les campagnes européennes, mauvaises récoltes, absence de fourrage en quantité suffisante et pénuries alimentaires diverses ont conduit à des abattages massifs de bétail et d'animaux de trait. Le cheval se faisant rare, le baron Drais a eu l'ingénieuse idée de le remplacer par sa machine. Au départ primitive, sa draisienne s'est améliorée au fil des décennies pour devenir le moyen de locomotion que nous connaissons aujourd'hui. Parmi les améliorations notables, on peut citer le pédalier, la transmission par chaîne (H.J. Lawson - 1879) et les pneumatiques (Dunlop - 1888).

Depuis, et l'Histoire l'a souvent montré, la bicyclette est devenue LE moyen de transport résilient incontournable. Le vélo est léger, peu encombrant, discret, capable de transporter de lourdes charges, facile à réparer, indépendant de toute source d'énergie autre que votre énergie musculaire. Un vélo vous portera plus loin que vos seules jambes, et transportera plus de matériel que vous ne pourriez en porter sur votre dos, et ce quel que soit le temps, l'état de la route ou le prix du litre de carburant !



Bref, en matière de résilience, disposer d'un vélo en état de marche constitue une base incontournable dans toute préparation.


Introduction

Je profite de la remise en état d'un vieux vélo pour vous le présenter. Il s'agit d'une bicyclette de type hollandais, fabriquée en Chine et dans quelques autres pays asiatiques depuis les années 50, et connue en Occident sous le nom plus ou moins générique de "Flying Pigeon", qui désigne en fait la marque Feige, premier fabriquant chinois historique de ce vélo. Evidemment, on retrouve cette machine sous d'autres appellations et d'autres marques, les 3 autres marques chinoises principales étant Wu Yang (5 béliers), Feng Huang (Phoenix), et Yongjiu (Forever). On estime à plus de 500 millions le nombre de vélos de ce type en circulation, essentiellement en Asie, ce qui en fait le moyen de locomotion le plus fabriqué au monde, toutes catégories confondues. Le Pakistan, l'Inde et la Malaisie fabriquent également ce vélo, mais je les soupçonne de ne faire, à des degrés divers, que de l'assemblage de composants chinois, un peu comme nos constructeurs automobiles nationaux en fait !

Ce type de vélo a accompagné durant des décennies un nombre incalculable de familles, et a souvent constitué leur seul et unique moyen de transport, pour ne pas dire leur seule richesse (à laquelle on pouvait ajouter une montre et une machine à coudre, et pour les plus riches un appareil photo). Sa conception s'appuie sur un modèle de la marque britannique Raleigh des années 30, que les chinois ont copié et adapté à la fabrication de masse, notamment en simplifiant nombre de pièces, en standardisant des composants et surtout en les adaptant au système métrique.



On retrouve cette bicyclette en Chine évidemment, mais aussi au Vietnam, Laos, Cambodge, Cuba, Inde, Mongolie, Afrique... En 1982, ce vélo coûtait 170 Yuans, soit l'équivalent de 3 mois de salaire moyen chinois de l'époque. La Chine n'en produisait alors que 11 millions par an, ce qui le rendait difficile à obtenir. Seul 1 chinois sur 12 en était équipé, et le temps d'attente dépassait allégrement 4 ans. Et donc, logiquement, ce vélo a été aussi l'objet le plus volé dans la Chine communiste des années 80, ce qui a conduit à l'obligation d'immatriculation des vélos à travers tout le pays !

Ce vélo a bien évidemment participé aux différents conflits ayant ensanglanté le continent asiatique, de l'Indo à la guerre du Vietnam en passant par l'aventure Khmer. Utilisé comme mule à-tout-faire, rustique, robuste, silencieux et exempt de signature thermique, il a permis la réalisation de véritables prouesses logistiques et militaires face à des ennemis technologiquement supérieurs.

Standardisation à outrance oblige, l'offre chinoise se limite grosso modo à 3 modèles, chacun décliné en 2 tailles de cadre : 22 et 24 pouces. Le plus courant - PB-02 - reprend la géométrie de la machine Raleigh des années 30. Un modèle au cadre renforcé par une seconde barre transversale - PB-06 - est destiné au transport logistique. Enfin un modèle pour femme - PB-13 - complète la gamme. Notez que si vous souhaitez investir quelques milliers d'euros dans un business post peak oil prometteur, vous pouvez importer de Chine ce vélo en kit, par conteneurs de 100 unités !





L'objectif de ce fil de discussion est de vous présenter la machine et de faire un petit tour du monde afin d'en apprécier le potentiel utilitaire. Je vous montrerai brièvement les travaux de rénovation effectués pour remettre en état ce vélo ! Sachant que deux c'est un, et un c'est zéro : j'en ai un second sur l'établi, de marque Phoenix. Au passage, on en profitera pour aborder des sujets moins spécifiques à ce vélo, mais tout aussi utiles dès lors que vous envisagez d'entretenir ou réparer vous-même votre bicyclette. Et tant qu'on y est, si vous rencontrez un quelconque problème technique sur votre vélo, n'hésitez pas à l'exposer dans ce fil de discussion, plusieurs intervenants du forum étant calés sur le sujet.


Présentation de la machine

Mon exemplaire est un Wu Yang fabriqué à Guangzhou (Canton) dans les années 80-90, trouvé dans une grange savoyarde et acheté pour une poignée d'euros. L'ancien propriétaire, autrefois expatrié en Chine, en aurait ramené plusieurs en France, sous forme de kits. Il s'agit du modèle PA-06 à cadre renforcé, pourvu d'un "petit" moteur 2 temps de 88 cm³, permettant de motoriser l'engin. Vu la puissance du bidule - 6 chevaux affichés, sans doute un peu moins - et l'indigence des équipements de sécurité, autant dire que les chances que le pointilleux TÜV allemand homologue l'engin sont nulles !

Quelqu'un a manifestement fait la même découverte que moi et présente son vélo sur un forum spécialisé dans la rénovation de vélos anciens : https://forum.tontonvelo.com/viewtopic.php?f=43&t=32050

Son vélo :


La motorisation trouverait ses origines en ex-Union Soviétique, où elle aurait équipé les premières bicyclettes motorisées. Evidemment, russes et chinois ont une réputation de bidouilleurs invétérés, et donc ce vélo a servi et sert toujours de base à une foultitude de bricolages en tous genres : triporteur, taxi à pédales, éolienne, groupe électrogène mobile, etc.

Ce modèle de vélo présente de nombreux avantages et inconvénients. Commençons par les avantages :
- Il est construit intégralement en acier et donc robuste.
- Comme tous les vélos en acier, le cadre reste facilement réparable ou modifiable dans n'importe quel atelier de campagne en cas de fissure, casse ou déformation, chose impossible avec un cadre en aluminium ou en carbone, qui en général est bon pour la poubelle.
- Il est bon marché.
- Il est recyclable car constitué quasi-exclusivement de ferraille et d'un peu de caoutchouc.
- Il est durable : c'est l'objet typiquement transmis de générations en générations.
- La plupart de ses composants sont surdimensionnés. Les rayons de la roue arrière par exemple font 5mm de diamètre, contre au mieux 2mm sur un vélo moderne. Quant au porte-bagage, il est construit en acier profilé de 5mm d'épaisseur et pèse 4 kg ! Vu le poids du bidule, j'ai préfèré m'en passer.
- Toutes les pièces - que ce soit la visserie, les roulements à billes... - sont standards et facilement trouvables à vil prix dans n'importe quel magasin de bricolage ou de cycles.
- La double béquille intégrée est un modèle de stabilité et autorise des réparations impromptues sur le bord de route sans recourir à un pied d'atelier.
- Un seul outil permet d'intervenir sur 95% des pièces. Seul le démontage de la cuvette requiert un outil spécial, qu'il est facile d'improviser.
- Ce vélo accepte tout type de chaîne.
- La plupart des pannes peuvent se réparer avec des composants improvisés ou issus du bricomachin local.
- Le potentiel d'amélioration de ce vélo est incroyable. On peut lui rajouter un moteur auxiliaire, des vitesses au moyeu, monter des freins Cantilever ou tambours, renforcer la fourche avant pour transporter de lourdes charges façon "piste Ho-Chi-Minh", etc.
- Ce vélo est monovitesse (single speed) et donc extrêment simple à réparer et à maintenir en ordre de marche.
- Enfin ce vélo affiche un aspect vintage intemporel !

Passons maintenant aux inconvénients, qui sont également nombreux :
- Ce vélo est certes pourvu d'une roue libre, mais n'offre qu'une seule vitesse !
- Ce vélo est TRES lourd ! On parle là de plus de 20kg quand même... Autant sur du plat c'est acceptable, autant en relief accidenté le pédalage devient sportif ! J'habite au sommet d'une colline, et bien qu'habitué aux déplacements en vélo, je ne parviens pas à monter la pente avec ce tank.
- Les technologies utilisées datent des années 30 et sont largement dépassées : freins à tringles, pédalier à clavettes...
- La qualité des composants laisse souvent à désirer. Les pédales par exemple ont une facheuse tendance à s'autodétruire rapidement. L'acier utilisé pour la visserie est plutôt mou, et donc le risque de foirer un filetage lors d'une maintenance est conséquent. La protection contre la corrosion est toute symbolique : les pièces sont soit sommairement galvanisées, soit peintes grossièrement. Le chrome quant à lui ne protège pas de la corrosion, au contraire ! Seul un entretien régulier permet de tenir la rouille à l'écart.
- Ce vélo ne répond plus vraiment aux standards de sécurité actuels. Le dispositif de freinage est complètement dépassé, même si ce système, correctement réglé (c'est rarement le cas...), fonctionne parfaitement.
- La moindre intervention sur la roue arrière, à commencer par une simple crevaison, requiert énormément de démontage. La dépose d'une roue implique en outre une cinématique très particulière en raison du profil de la jante Westwood ! Mon conseil : surtout ne démontez en aucun cas les étriers de freins sur ce type de vélo !

Malheureusement je me suis lancé dans les travaux de rénovation sans faire de photos de l'état d'origine dans lequel j'ai trouvé ce vélo. Je ne vous montre donc que le résultat final, sachant que la motorisation reste à remettre en état et à assembler !











Le blason riveté sur le cadre - manifestement une lubie des fabricants chinois ! - constitue à lui-seul un sujet de collection !



Quelques accessoires ont été ajoutés pour conférer un brin de caractère à ce vélo. La barre transversale étant tronquée afin de permettre l'installation d'un réservoir, j'ai pris la liberté d'y placer une pompe à vélo de récupération en attendant. J'ai rajouté un ressort sur l'axe de la pompe afin d'assurer le maintien du bidule sur le cadre. 2 barres de renfort viennent renforcer la fourche avant. Le porte-bagage d'origine est remplacé par un autre, plus léger. Et pour finir un phare à LED constitue l'éclairage avant.





La seule amélioration notable concerne le pédalier. Dans sa configuration d'origine, l'axe du pédalier - à clavettes ! - est monté sur des roulements à billes non sécurisés. A l'ouverture, c'est le jackpot assuré ! A minima, il faut remplacer ce puzzle par des roulements en cage, plus simples à monter. Comme le filetage du cadre était en outre partiellement foiré, j'ai opté pour une solution plus radicale, à savoir une cartouche à axe carré et un nouveau pédalier compatible.



La roue arrière est pourvue d'un second pignon, afin de permettre son entraînement par le moteur lorsque celui-ci est monté :



Une petite vue sur le groupe moto-propulseur, qui reste à démonter, nettoyer, remonter et assembler :




Utilisations

Comme dit plus haut, ce vélo est en service dans de nombreuses parties du monde depuis presque 7 décennies. Comme des images sont plus parlantes qu'un long discours, le plus simple est de vous montrer ses divers usages utilitaires.

On commence avec la Chine :








Inde :





Afrique :

























Népal :














Cuba :





Pakistan :













Bangladesh :














Vietnam :





Mongolie :


Afghanistan :
















Contrairement à ce que l'on pourrait penser, la Corée du Nord, bien que communiste tendance stalinienne, constitue un cas à part. La bicyclette du peuple y est quasiment inconnue, les nord-coréens préférant fabriquer en sous-main des cycles d'inspiration japonaise, voire même reconditionner des cycles de seconde main issus de l'archipel nipon.

L'histoire contemporaine comporte également son lot de clichés où ce type de vélo apparaît. Il acquiert un statut emblêmatique pendant les guerres d'Indochine puis du Vietnam, lors desquelles il jouera le rôle de bête de somme à tout faire. Certains vélos pouvaient ainsi être chargés jusqu'à 400kg !








On remarquera les roues renforcées, le porte-bagage et les pédales en bois, voire carrément la suppression totale du pédalier, ainsi que le dispositif de pilotage fixé sur le guidon et la tige de selle.

Ici des partisans chinois dans les années 50 :



Des Tigresses Tamoules en patrouille :



Liens utiles

L'éruption du Tambora en 1815 : https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89ruption_du_Tambora_en_1815
La bicyclette Flying Pigeon : https://en.wikipedia.org/wiki/Flying_Pigeon
Le blog sympa d'un autrichien expatrié en Chine et collectionneur frénétique de vélos : https://thebagelchronicles.typepad.com/theflyingpigeonproject/


Conclusion

Au-delà de la présentation de ce vélo emblématique, l'objectif de ce fil de discussion est de montrer que les vélos anciens ou obsolètes, tels ceux trouvés dans les décheteries ou achetés à vil prix via les petites annonces, conservent un intérêt certain dans une optique de résilience et méritent d'être sauvés. On peut facilement transformer ces dinosaures du passé en robustes véhicules à tout faire, à défaut d'en faire des bêtes de course.

Dans les posts suivants, je montrerai diverses réparations, rénovations, optimisations, bidouilles et détournements facilement réalisables avec un minimum de moyens. Et si vous souhaitez partager une astuce ou rencontrez un problème particulier sur votre bécane, n'hésitez pas à poster sur ce fil de discussion !

Rammstein

Salut Ramm,
merci pour ce topic très riche, bien documenté, raconté et illustré, un must quoi

Petite question préliminaire : la fourche semble prendre pas mal. Est-ce que la tige en rab à l'avant est un renfort ?

Rammstein a écrit:
Standardisation à outrance oblige, l'offre chinoise se limite grosso modo à 3 modèles, chacun décliné en 2 tailles de cadre : 22 et 24 pouces. Le plus courant - PB-02 - reprend la géométrie de la machine Raleigh des années 30. Un modèle au cadre renforcé par une seconde barre transversale - PB-06 - est destiné au transport logistique. Enfin un modèle pour femme - PB-13 - complète la gamme. Notez que si vous souhaitez investir quelques milliers d'euros dans un business post peak oil prometteur, vous pouvez importer de Chine ce vélo en kit, par conteneurs de 100 unités !

Est-ce qu'il y a une standardisation avec les pièces usuelles, par exemple pour changer une jante ?

Est-ce que tu aurais un budget moyen entre achat et réparation ? J'en vois une dizaine sur Leboncoin sur toute la France; la plupart sont rouillés et semblent évalués grâce au côté "vintage" avec l'écusson qui donne évidemment du cachet.
Quel serait le prix moyen "honnête" pour une version pas trop endommagée, cad pouvant nécessiter de la petite réparation, mais trop dégradé ?

Mon exemplaire est un Wu Yang fabriqué à Guangzhou (Canton) dans les années 80-90, trouvé dans une grange savoyarde et acheté pour une poignée d'euros.  !

- La qualité des composants laisse souvent à désirer. Les pédales par exemple ont une facheuse tendance à s'autodétruire rapidement. L'acier utilisé pour la visserie est plutôt mou, et donc le risque de foirer un filetage lors d'une maintenance est conséquent. La protection contre la corrosion est toute symbolique : les pièces sont soit sommairement galvanisées, soit peintes grossièrement. Le chrome quant à lui ne protège pas de la corrosion, au contraire ! Seul un entretien régulier permet de tenir la rouille à l'écart.

Est-ce qu'il y a plusieurs "qualités" de vélo ? J'ai rarement eu du métal de mauvaise qualité avec les pièces des années 80...
Est-ce que l'on peut estimer que ceux qui ont traversé les générations avaient la même qualité que les versions plus récentes ?

La seule amélioration notable concerne le pédalier. Dans sa configuration d'origine, l'axe du pédalier - à clavettes ! - est monté sur des roulements à billes non sécurisés. A l'ouverture, c'est le jackpot assuré ! A minima, il faut remplacer ce puzzle par des roulements en cage, plus simples à monter. Comme le filetage du cadre était en outre partiellement foiré, j'ai opté pour une solution plus radicale, à savoir une cartouche à axe carré et un nouveau pédalier compatible.

C'est quelles dimensions d'axe ? Je demande car le changement de pédalier a été la plus grosse intervention sur mon vtt. Boitier cassé (bon, j'ai abusé en faisant limite du cross debout sur le pédalier...), filetage abîmé, etc.
Du coup, refileté + nouveau boitier.

Le biclou nécessite-t-il des outils spécifiques par rapport à un autre vélo (genre une clef "Flying Pigeon") ou autre.

Il s'agit du modèle PA-06 à cadre renforcé, pourvu d'un "petit" moteur 2 temps de 88 cm³, permettant de motoriser l'engin. Vu la puissance du bidule - 6 chevaux affichés, sans doute un peu moins - et l'indigence des équipements de sécurité, autant dire que les chances que le pointilleux TÜV allemand homologue l'engin sont nulles !

As-tu une idée de la conso/autonomie de l'engin ? Comme pour le vélo : pièces standards ?

Je ne manquerai pas de suivre le topic

Je comprends bien l’intérêt d'une rénovation de vélo m'étant moi-même pas mal livré à cette activité il y a quelques années. Intérêt double : le plaisir de la chose et l'acquisition d'un savoir-faire un peu particulier. J'étais à l'époque justement actif sur https://forum.tontonvelo.com/index.php sous le nom de Philippe-du-75013

Pour le moteur je suis plus dubitatif sur l’intérêt de le remettre en route sérieusement entre pièces de rechange introuvables, passage aux mines en individuel invraisemblable, cylindrée bâtarde qui met dans la même catégorie que les 125 CC. De plus ce 88 cc à basse technologie doit consommer plus qu'un 4 temps utilitaire de 10 cv comme celui de la petite Honda CG 125. 

A ce sujet j'avais évoqué ici il y a longtemps  l’intérêt de conserver un cyclomoteur d'un modèle le plus courant possible (mais non coté en collection comme une Motobécane "grise" AV49) et de chiner quelques épaves identiques pour les pièces.

Philippe-du-75013 a écrit:Pour le moteur je suis plus dubitatif sur l’intérêt de le remettre en route sérieusement entre pièces de rechange introuvables, passage aux mines en individuel invraisemblable, cylindrée bâtarde qui met dans la même catégorie que les 125 CC. De plus ce 88 cc à basse technologie doit consommer plus qu'un 4 temps utilitaire de 10 cv comme celui de la petite Honda CG 125.

L'intérêt de ce moteur est qu'il s'adapte sur la plupart des cadres de vélos. Son gros avantage : il est plus ou moins standard, et les chinois en fabriquent des millions chaque années depuis des décennies. On le retrouve en kit sur différents sites d'enchères et commerciaux (à ma zone, Ali Baba...) pour 80 à 150€. J'ai commandé des accessoires et joins : tout est compatible, et je soupçonne que les moules et outillages du bloc moteur n'ont que peu évolué depuis le lancement de la fabrication. Côté consommation, effectivement c'est un 2 temps, donc pas forcément sobre et propre, surtout vu la qualité de fabrication (comparée à un moteur Solex par exemple).



La légalité du bidule est le gros point noir, qui rend de facto le vélo motorisé inutilisable dans le contexte légal actuel, à moins de ne restreindre son utilisation à un terrain privé. Mais dans un contexte plus dégradé (Irma, Fukushima...), ce kit reste un moyen bon marché pour motoriser un vélo sur le pouce à moindre coût (plusieurs vélo ainsi modifiés sont d'ailleurs en vente sur le good corner). Enfin il reste des endroits reculés où les forces de l'ordre ne mettent jamais les pieds ("pas vu, pas pris")... Pour le cas où la motorisation deviendrait un boulet inutile et encombrant (panne sèche, contrôle), on peut facilement s'en débarasser et continuer sa route en pédalant.

Le potentiel d'utilisation du moteur dépasse en outre le cadre cycliste. Il peut en effet servir à bidouiller un générateur de fortune. On peut le modifier pour le faire tourner à l'éthanol ou à l'air comprimé. On peut même le transformer en machine à vapeur !  



Rammstein

tarsonis a écrit:Petite question préliminaire : la fourche semble prendre pas mal. Est-ce que la tige en rab à l'avant est un renfort ?

La géométrie d'origine n'est effectivement pas des plus favorables... En utilisation normale cela ne prête pas à conséquence, mais pour un usage plus utilitaire (transport de charges lourdes), il existe effectivement des renforts montés sur ressort afin de soulager la fourche.

tarsonis a écrit:Est-ce qu'il y a une standardisation avec les pièces usuelles, par exemple pour changer une jante ?

Les jantes sont au format 40x635 et sont de type Westwood avec bande de freinage à l'intérieur de la jante. C'est donc exotique chez nous, mais trouvable, sans surcoût significatif par rapport à une jante plus commune. Comme la position des étriers de freins peut être modifiée (environ 3-4cm de jeu, un des rares avantages du système de freinage à tringle), il doit être possible de changer le diamètre des roues sans trop de difficultés pour peu qu'on reste sur un profil de jante Westwood. Sinon il reste toujours l'option de changer les jantes et percer le cadre et la fourche pour y monter des étriers de freins plus conventionnels.

tarsonis a écrit:Est-ce que tu aurais un budget moyen entre achat et réparation ? J'en vois une dizaine sur Leboncoin sur toute la France; la plupart sont rouillés et semblent évalués grâce au côté "vintage" avec l'écusson qui donne évidemment du cachet.
Quel serait le prix moyen "honnête" pour une version pas trop endommagée, cad pouvant nécessiter de la petite réparation, mais trop dégradé ?

Sous nos latitudes franchement il y a mieux à pas cher. Si j'ai présenté ce type de vélo, c'est surtout car il est très répandu dans les pays pauvres et a été fabriqué en masse en Asie. 100€ me semble le prix maximum à investir pour un tel vélo d'occasion. Il faut compter une cinquantaine d'euros en plus pour les pièces de rechange. A titre informatif, les chinois vendent ce vélo neuf en kit pour 50$ l'unité, sous réserve d'en acheter 130 mini. C'est un vélo de type "hollandais" (roadster), donc plutôt destiné au plat.

tarsonis a écrit:Est-ce qu'il y a plusieurs "qualités" de vélo ? J'ai rarement eu du métal de mauvaise qualité avec les pièces des années 80...
Est-ce que l'on peut estimer que ceux qui ont traversé les générations avaient la même qualité que les versions plus récentes ?

La marque Flying Pigeon est présentée comme étant le haut du panier en terme de qualité. Cela se voit sans doute sur la qualité de fabrication (tolérances, assemblage, soudures, aspect), sinon fonctionnellement toutes les marques chinoises citées plus haut fabriquent plus ou moins la même chose. Les pièces sont en outre interchangeables entre les marques. Je ne pense pas que la qualité ait beaucoup évolué au fil des décennies, à part peut-être pendant les périodes de crise. Sur le mien, j'ai dû reprendre la fourche à la meuleuse d'angle, la roue ne tournant pas rond à cause d'un bras plus long que l'autre de 8mm...  

tarsonis a écrit:C'est quelles dimensions d'axe ? Je demande car le changement de pédalier a été la plus grosse intervention sur mon vtt. Boitier cassé (bon, j'ai abusé en faisant limite du cross debout sur le pédalier...), filetage abîmé, etc.
Du coup, refileté + nouveau boitier.

Je vais faire un peu de spéléologie dans ma cave et te dis ça après. De mémoire j'ai payé moins de 20€ pour un pédalier et un boîtier de pédalier neufs.

tarsonis a écrit:Le biclou nécessite-t-il des outils spécifiques par rapport à un autre vélo (genre une clef "Flying Pigeon") ou autre.

Non, on peut faire toutes les réparations avec un tournevis plat, une clé à molette et un jeu de clés plates. L'extraction de l'axe du pédalier requiert un outil peu courant, qu'il est toutefois facile de fabriquer avec un bout de bois et 2 clous. Pour ce type de vélo les chinois commercialisent un multitool très médiocre ressemblant à des têtes de morts craniopages :

tarsonis a écrit:As-tu une idée de la conso/autonomie de l'engin ? Comme pour le vélo : pièces standards ?

La consommation du moteur doit facilement tourner à 2-3L au 100km. Les tolérances d'assemblage sont en effet larges, ce qui nuit à l'efficacité du moteur. Les pièces sont standards dès lors qu'on peut les commander en Chine. Elles coûtent une bouchée de pain, mais la qualité est aléatoire.

Rammstein

Topic intéresant ! Pour ma part, j'ai acheté des vieux vélos types hollandais à moyeu à vitesses mais je les ai revendus avant de m'y être trop investi car bonjour le chantier... Je préfère faire de l'achat-réparation-revente sur des plus récents. Pour notre contexte français, des Peugeot etc des années 1970-80 sont pas trop mal en terme de qualité, même si je travaille plus sur des vélos des années 1990-2000.

Tout cela me rappelle que le beau Lachlan Morton a pédalé son tour de France en solitaire cette année https://www.veloderoute.com/news/16766/lachlan-morton-un-tour-a-l-ancienne et a financé par cet exploit des buffalo bike, (pour World Bicycle relief) version moderne de cette bicyclette chinoise à destination des pays où se déplacer sans autre énergie que musculaire est un enjeu de survie. https://worldbicyclerelief.org/the-bike/

chapeau pour l'exploit!

"Lachlan Morton emportait dans ses sacoches - à l'image des adeptes de bikepacking - de quoi rouler en autonomie....Au total, l'Australien a parcouru 327 km par jour en moyenne.
Une manière de rouler le Tour de France renouant avec le très ancien principe opérant lors des grands Tours cyclistes du début du XXe siècle - et perpétué à nouveau ces dernières années avec des épreuves à la mode comme la TransAm et le Tour Divide aux États-Unis, ou la Transcontinental Race en Europe, pour les plus connues."

https://www.lequipe.fr/Cyclisme-sur-route/Actualites/Lachlan-morton-a-termine-son-tour-de-france-en-bikepacking-avant-le-peloton/1270127


PS: en lisant les commentaires je découvre=

Maximilian Schnell

"Il roule sur son vieux Peugeot acier des années 1980. Il porte un legging zébré, il roule en baskets. Et pourtant, plusieurs signes montrent qu'il n'est pas débutant."

https://www.weelz.fr/fr/bikepacking-maximilian-schnell-giro-tour-de-france-vuelta/

tarsonis a écrit:C'est quelles dimensions d'axe ? Je demande car le changement de pédalier a été la plus grosse intervention sur mon vtt. Boitier cassé (bon, j'ai abusé en faisant limite du cross debout sur le pédalier...), filetage abîmé, etc.
Du coup, refileté + nouveau boitier.

Tu as refait le filetage toi-même ? Si oui, quel outil as-tu utilisé ?

Concernant le vélo chinois présenté plus haut, la longueur d'axe est de 142mm. Il s'agit d'un montage à clavette, qu'on retrouve sur la plupart des vélos (et Solex !) jusqu'à la fin des années 70. L'axe et les roulements sont montés directement sur le cadre, sans recourir à un boîtier de pédalier. C'est plus durable et facilement réparable, par contre montage et démontage sont plus compliqués. L'astuce consiste à placer une bassine sous le pédalier, ou à fixer un aimant fort sur l'axe pour éviter de perdre des billes. Je remplace systématiquement ces pièces par des roulements en cage.





L'alternative, c'est un boîtier de pédalier en plastique ou en acier, qui a une durée de vie plus courte, dépendant souvent de la qualité de fabrication. Un changement est fortement recommandé dès que la transmission commence à "couiner" ou à prendre du jeu.

L'intervention sur le pédalier est sans doute l'opération la plus chi@nte lorsqu'on commence à faire de la rénovation ou des réparations :
- pour les vélos antérieurs à la fin des années 80, c'est la roulette russe au niveau des standards et des outils à utiliser,
- Souvent la visserie est grippée,
- L'accès à l'axe du pédalier suppose dans 90% des cas de déposer au préalable le pédalier,
- Certains constructeurs imposent leur solution maison, qui implique l'achat d'outils spécifiques.

Quelques exemples ci-dessous :


A gauche : le modèle d'origine à clavette du vélo chinois et son outil dédié
Au milieu : du standard français "carré" des années 90 (attention, là aussi la diversité est conséquente)
A droite : du Shimano Octalink, sans doute le must en matière de qualité d'assemblage (c'est japonais...)

Notez que l'outil chinois dédié au démontage de l'axe du pédalier peut facilement s'improviser avec un bout de planche et 2 clous !





Du Peugeot des années 80, qu'on peut qualifier d'excellente qualité avec le recul :


Du Shimano Deore actuel, qui requiert de l'outillage spécifique :


Du Mavic des années 80, également spécifique :


Un Solex 330 à clavette !


Et les exemples sont innombrables, surtout dès lors qu'on commence à toucher aux bicyclettes anglosaxonnes utilisant des pièces au standard impérial plutôt que métrique ! Si l'on se lance dans des travaux de restauration de vélos anciens, le mieux est de se limiter à une ou 2 marques au départ, le temps d'acquérir les outils spécifiques, les connaissances et les savoirs-faire associés. S'il s'agit d'entretenir son parc cycliste, on n'échappera pas à l'achat de l'outillage dédié, ou alors au pire au passage chez le mécano pour réaliser les interventions complexes.

Rammstein

La "potence tueuse", ou killer stem

La "potence tueuse", "potence de la mort" ou encore "killer stem" est un problème auquel vous pourriez être confronté si vous roulez avec une antiquité antérieure à la fin des années 70. De nombreuses bicyclettes anciennes sont par conséquent concernées. Je l'ai croisée sur plusieurs cycles Peugeot, et sans doute que les sous-marques Hélium et Talbot sont aussi affectées.

L'exemple qui suit est un vélo Peugeot typé "sport" des années 70. La potence, c'est cette pièce faisant la liaison entre la fourche et le guidon :





Dans le cas présent, la pièce incriminée, de marque AVA et fabriquée en fonte d'aluminium, souffre d'un grave défaut de conception : son extrêmité est fendue dans le sens de la longueur en 2 endroits, afin d'assurer un maintien par friction avec la fourche. Malheureusement, l'extrêmité de cette fente constitue ce que l'on appelle en jargon mécanique une "zone de concentration de contrainte". Il suffit de serrer un peu trop fort la vis lors de l'assemblage pour que le plongeur (= l'écrou conique qui vient s'insérer à l'intérieur de la potence) vienne fissurer la potence. Ajoutons à cela un éventuel problème de qualité, toujours possible, et nous avons les ingrédients d'une catastrophe potentiellement dramatique.



Lors de l'utilisation du vélo, la fissure va se propager dans la pièce au gré des sollicitations transmises via le guidon et la fourche. Jusqu'à la rupture, d'où le terme "potence tueuse"... Il semblerait que ce défaut ait en effet coûté la vie à quelques cyclistes dans le passé. Imaginez dévaler une côte à 80km/h et casser la direction sur un nid-de-poule, ou bien briser la potence lors d'un sprint ou d'une ascension en danseuse !

Mécaniquement parlant, le profil de la propagation de fissure est très intéressant et constitue un cas d'école : la fissure court en effet en spirale sur la longueur de la potence, jusqu'à la zone de rupture. Je me suis rendu compte du problème lors du démontage du guidon : la potence s'est brisé net !







A part remplacer la potence par une pièce neuve ou plus robuste, il n'y a pas grand chose à faire pour remédier à ce défaut. En bureau d'étude, Le problème de conception se règle quant à lui simplement en se limitant à une seule fente et en ajoutant un trou circulaire à son extrêmité, comme on peut le voir sur la potence ci-dessous, plus récente. Je vous déconseille toutefois fortement de réaliser une telle modification vous-même à la perceuse, ce remède étant pire que le mal.





Ce trou permet de mieux diffuser les contraintes dans la pièce et d'éviter l'apparition d'amorces de fissures. Evidemment, on veillera également à ne pas serrer comme un dingue la vis de fixation. On trouve facilement sur le net le couple de serrage à appliquer.

Les anciennes potences ATAX - et sans doute d'autres marques - souffrent également du même défaut. Si vous roulez avec une telle antiquité, rénovez de vieux biclous ou envisagez d'acheter un vélo d'occasion, cela vaut le coup de jeter un coup d'oeil sur l'état de la potence avant de vous lancer dans la pente à fond les manettes !

Rammstein

PS : désolé pour la piètre qualité des photos, mon PC est en vrac !

A propos de potences : sans avoir touché aux vélos hollandais trop particuliers  il existe 2 standards de diamètre de potence et ça ne se voit pas à l'oeuil nu tant l'écart est faible. Ça donne l'impression de pouvoir passer en forçant mais ça ne passe pas ou au contraire ça flotte.

Hello,

Rammstein a écrit:

tarsonis a écrit:C'est quelles dimensions d'axe ? Je demande car le changement de pédalier a été la plus grosse intervention sur mon vtt. Boitier cassé (bon, j'ai abusé en faisant limite du cross debout sur le pédalier...), filetage abîmé, etc.
Du coup, refileté + nouveau boitier.

Tu as refait le filetage toi-même ? Si oui, quel outil as-tu utilisé ?

Oups, je n'avais pas vu ta question, désolé !

Oui, j'avais refait le filetage, en atelier associatif.
Il faut un taraud pour boitier de pédalier... heureusement cette fois j'avais le filetage au standard BSA (1.37" x 24 TPI).

Rammstein a écrit:On retrouve cette bicyclette en Chine évidemment, mais aussi au Vietnam, Laos, Cambodge, Cuba, Inde, Mongolie, Afrique...

RDC : 50km en vélo chinois avec 300kg de charbon sur le porte-bagage (à 34min 42sec) !    



Rammstein

Ah oui quand même. J'ai déjà transporté 150km sur mon vtt, mais les jantes commençaient à tâter le sol.

Sinon lors d'une petite glissade, le dérailleur arrière a cassé.


Le truc un peu dingue étant que le genre de patte était en plastique, alors que j'ai toujours vu du métal :


Bon sur le coup je n'avais pas la pièce de rechange, et encore une bonne vingtaine de km à faire pour revenir. Donc bidouille à la volée avec le dérive-chaîne. Il faut trouver le pignon arrière naturel sur lequel la chaine va se positionner (sinon cela va dérailler en permanence).
En gros quand elle est droite, puis on retire l'excédent de chaine et on ajuste au maillon près :